« Aux cordées de la réussite, la jeunesse aide la jeunesse, et nous sommes les facilitateurs de ces rencontres »
20 janvier 2023AgroParisTech accueille, ce samedi 21 janvier, la Journée nationale Cordées de la Réussite organisée par l’Université Paris-Saclay, dont l’établissement est une grande école composante. L’occasion d’en savoir plus sur ce dispositif qui permet aux collégiens et lycéens de quartiers prioritaires et étudiants-tuteurs de grandes écoles de se rencontrer autour d’un programme visant à faciliter l’accès de ces jeunes à un enseignement supérieur d’excellence. Entretien avec Noreen Shah, cheffe de projet cordées de la réussite et et Sid-Ali Alili, stagiaire chargée de mission, à AgroParisTech.
Avant de nous en dire plus sur le programme de la Journée nationale Cordées de la réussite (JNCR) prévue à AgroParisTech pour tout la cordée mutualisée de l’Université Paris-Saclay, pouvez-vous nous en dire plus sur ce que sont les cordées de la réussite ? Quand le dispositif a-t-il débuté ?
N.S. Les cordées de la réussite est un dispositif national, subventionné par l’État et les régions, qui existent depuis une quinzaine d’années. Elles ont pour objectif, à travers un programme rôdé sur une année scolaire, de promouvoir l’égalité des chances en accompagnant des collégiens et lycéens, en favorisant l’ouverture sociale et culturelle, en luttant contre l’autocensure et en brisant les barrières psychologiques qui peuvent exister pour des élèves d’établissements en Réseau d’Éducation Prioritaire (REP, REP+) qui commencent à réfléchir sérieusement aux études post-bac. Le dispositif permet de faire se rencontrer ces élèves et des étudiants d’AgroParisTech qui deviennent leurs tuteurs. L’expérience est aussi enrichissante pour les tuteurs. A AgroParisTech, les Cordées de la réussite ont pris de l’ampleur au fil des années : nous avons commencé avec deux partenariats (un collège et un lycée) et aujourd’hui nous collaborons avec onze établissements, accompagnons 200 élèves avec près de 80 tuteurs.
Vous parliez de programme. Concrètement, comment se traduit ce dispositif au sein d’AgroParisTech ?
N.S : Le programme est proche d’un établissement à un autre et il se traduit par trois types de rendez-vous mensuels entre tuteurs et élèves d’octobre à juin.
En premier lieu par des modules (rencontres entre élèves et tuteurs dans des espaces dédiés sur le campus avec des sujets autour de l’orientation, les actualités…). Et il faut bien comprendre que ce n’est pas du soutien scolaire ! L’étudiant-tuteur est là pour répondre aux questions que peut se poser un élève sur son orientation, sur l’école, sur l’actualité, mais il ne l’aide pas aux devoirs, car ce n’est pas le but de ce dispositif.
En second lieu, les visites culturelles, qui regroupent aussi bien des visites dans des lieux culturels (Louvre, bateau-mouche, Cité des Sciences…) que des visites d’entreprises. Le fait que la jeunesse aide la jeunesse, c’est une opération gagnante : ils n’ont pas tellement d’écart d’âge, ils peuvent plus facilement se comprendre, ce qui fait par exemple qu’une visite au Louvre est peut-être perçue différemment ou est moins ennuyeuse entre jeunes (sourires). On crée un lien sur toute une année scolaire, et quel plaisir de voir élèves et tuteurs qui ne se connaissent pas en octobre se serrent dans les bras en juin ! Cette année trois groupes vont partir en voyages courts à Berlin, Amsterdam et Marseille.
Enfin, les grands évènements, souvent mutualisés au sein de la communauté Paris-Saclay ou de ParisTech, regroupant tuteurs, élèves et intervenants extérieurs qui viennent présenter, via des ateliers par exemple, leurs métiers. Le curseur est ici davantage mis sur l’orientation, car il faut savoir que beaucoup de jeunes élèves se trompent dans leurs premiers choix d’orientation. Et ça, souvent par méconnaissance, par censure ou par fausses idées sur un métier ou sur tel autre. Ça leur permet de poser des questions, de découvrir vraiment les métiers en rencontrant les acteurs et de surtout pouvoir se dire à la fin : pourquoi pas moi ?
Quel est votre rôle à vous deux ?
N.S : Sid-Ali et moi-même sommes des coordinateurs, des « facilitateurs » puisque nous préparons le programme et avons pour objectif que tout se déroule au mieux toute l’année. Nous établissons les plannings, organisons les visites de A à Z et assurons la logistique des évènements. Nous veillons également à ce que nos tuteurs soient accompagnés dans leur rôle, avec des formations (par des psychologues, des sociologues…). Cette année, j’ai la chance d’avoir Sid-Ali dans mon équipe. Il est étudiant en master de sociologie à l’Université d’Évry.
S-A.A : Oui, j’assiste Noreen dans toutes ses tâches jusqu’à la fin de l’année scolaire et je suis très content de faire partie de cette aventure. De par mes études, je vais également être attentif à l’impact des cordées sur les élèves en échangeant aussi bien avec eux qu’avec leurs tuteurs, en soumettant un questionnaire en ligne…Car ce qui nous manque aujourd’hui, c’est justement d’évaluer concrètement cet impact.
N.S : Effectivement, nous envisageons pour la première fois de faire un vrai bilan de l’année. Les périodes de confinement nous ont aidés à faire une introspection sur le dispositif, sur ce que l’on faisait avant et sur la façon dont nous devons avancer maintenant… Les chiffres bilans actuels sont constitués d’indicateurs chiffrés, mais pouvoir constater l’émerveillement des élèves lorsqu’ils visitent le potager sur le toit ou le sourire sur le visage des tuteurs lorsqu’ils sortent d’un module, ce cela nous donne le sens et la motivation de notre métier.
Est-ce plus compliqué d’organiser ces rencontres depuis que vous êtes sur le Campus de Palaiseau ?
N.S : Au contraire ! Tout est là. Même logistiquement, c’est plus simple. Quand nous étions éparpillés au centre de Massy, à Grignon, nous étions un peu plus dans notre bulle, nous échangions aussi davantage à distance avec nos collègues d’établissements de Paris-Saclay, je ne rencontrais pas tous les mois les étudiants-tuteurs… Alors quel bonheur de les voir sur place à chaque fois ! Le campus permet cette circulation plus facile aussi, d’une salle à l’autre, d’un amphithéâtre à l’autre… D’ailleurs pour l’anecdote, la dernière fois que les élèves sont venus visiter le campus, ils ont pu entrer dans un amphi et ils ont été impressionnés par sa taille ! Ils ont voulu s’asseoir pour voir ce que ça faisait d’être un « grand ». J’ai dit aux tuteurs : laissez-les quelques minutes ici, qu’ils s’imprègnent et s’approprient le lieu. C’est la meilleure façon de se projeter et encore une fois, de se dire : pourquoi pas moi ?